Moucherie

11/12/2018

La maison ne fonctionne pas. Les souris vivent à l’intérieur de ses murs, les mouches colonisent les espaces de vrombissements et de  vieux grincements écœurants. Quant aux humains, ils courbent l’échine, calfeutrent leurs oreilles pour oublier les bruits grouillants des mouches qui se meurent ou  qui copulent. Ils remuent leurs cheveux, leurs mains.  l’humain dans un environnement d’envahissement moucheresque est un balourd cherchant son chemin. Dessous  de lunettes, amorce de narines, commissure de lèvres, peu leur importe l’aire, les mouches l’adoptent en plein. Elles semblent affectionner particulièrement les chevilles et tout coin de cuisine travaillé.  Des coins de peau deviennent de minuscules antres pour insectes sans scrupules missionnés pour quadriller au plus nombreux l’espace de leurs allers et venues. Les mouches confectionnent des plans de destruction de la délectation des échanges verbaux et de  l’ingestion des mets par les humains. La déchéance de ces deux temps semble être leur mission. La rapide vaisselle, l’accourcissement des phrases sonnent comme leur heure de gloire. Elles nous colonisent par vagues, par dépit. Le ménage ne fait rien à l’affaire, elles redoublent d’efforts au sol, sur les tentures, les enfants , les nappes et les livres. C’est un assaut méthodique sans élévation d’âme ou de pensée, sans communication. Les humains ferment les rideaux, en rajoutent d’autres, astiquent, rincent,parfument chaque millimètre carré de vie. Les mouches sont déjà là et votre pauvre corps n’y peut rien. Fermez la lumière. Alors peut-être s’en iront-elles quelques heures. La maison refoule les humains qui daignent y dormir, choisissent d’y manger.