Pour Down to the ground de Paul Wallach

13/06/2018

Down to the Ground de Paul Wallach marque le point d’orgue du passage de l’artiste de la micro-sculpture au monumental, presque sans transition. Comme si un botaniste auscultait soudain les étoiles de la même manière qu’il le ferait des spécimens rencontrés dans un brin de forêt. Down to the ground, a fait atterrir une étoile dans un grand parc de Salzburg, pour le Krauthugel. Elle se dessine sobrement à fleur de terre avec un périmètre d’espace qu’elle a emporté avec elle lors de sa descente. Ce « land drawing », comme le définit l’artiste, ne dépasse pas les 40 cm de hauteur et se déploie sur 40×45 mètres.

Si Paul Wallach a changé d’échelle de travail, il continue de sculpter ce qui ne tient dans sa main : l’air, sa contenance et son volume, puis dans le cas présent, la faune et la flore autour de laquelle le dessin sculptural vient s’apposer sans trop contraindre, sans occulter. Il vient également sculpter l’attente, la projection par l’esprit, comme si ses installations étaient tour à tour miroir grossissant ou rapetissant pour nos corps.

L’humain qui visite les oeuvres de Paul Wallach est toujours hors d’échelle et c’est de cela qu’elles tirent leur force et leur spécificité. Il est heureux de rencontrer des œuvres où les éléments semblent converser entre eux, sans nous. Paul Wallach ajoure des mondes qui ne nous concerne guère et où nos empreintes ne sont ni posées ni bienvenues. Le spectateur ressent alors des lignes de communications intangibles pour l’espèce humaine. L’œuvre est faite pour un lapsus mental, pour créer un court-circuit de références.

L’humain visitant Down to the ground, ne peut comprendre à travers ses sens l’entièreté de l’œuvre. Paradoxalement il lui faut voler pour appréhender le tout de cette identité sculpturale. Et lorsqu’il foule l’herbe dans cette étoile et ce bout d’univers qu’elle a accolé à ses traits, imaginez l’immensité de ce que représente un de ses pas pour le moucheron sur sa feuille! Rapportez-le au ciel, et il devient saut temporel d’années-lumières, de milliers de kilomètres franchis en un souffle. Les milliards de substances et d’anti-substances que l’on retrouve dans un carré au fond de l’univers, ne sont-ils pas aussi foisonnants et pluriels qu’au coeur d’un modeste parterre auprès d’un château autrichien? Paul Wallach fait discuter l’herbe avec les étoiles, et tant pis pour l’humain hors d’échelle, son corps inadapté laisse place à l’esprit voyageur.

La sculpture de Paul Wallach est à rebours de toute ostentation humaine, voire masculine, qui a incité et donné forme à tout un tas de sculptures et de bâtiments s’érigeant à la verticale depuis le sol. La verticale chez Paul Wallach se donne à voir pour celui ou celle qui cherche dans l’invisible, dans la parole des signes, du sol jusqu’aux étoiles. Qui fait du trajet de sa pensée un monument, une nouvelle ligne de dessin.