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« Le royaume vert ou l’océan des possibles » de Karine Maussière

12/02/2022

Sur une invitation de Flore Gaulmier pour Amorce, telle une carte déroulée d’un étui immense, Le royaume vert ou l’océan des possibles s’étire sur sept mètres de long. L’œuvre se déploie en morse, avec des soupirs, des bonds et des raccords. De loin, de près, de matière ou de lignes. Cadré, relevé, mitoyen ou seul, la partition est écrite, le cardinal en clé d’ouverture, les trois sables en croches alignées. Le végétal en portrait. Silhouettes, et traces aussi. Cette installation conjugue nature morte et nature vivante en un congrégation d’émissaires multilingues. Belliers, graines, palmier, wako, bougainvillier… C’est une polyphonie photographique : variant les focales, jouant de cyanotype, de polaroid, du microscope ou de la longue vue. Chaque animal, chaque végétal, avec un médium d’expression qui le révèle, se distingue ainsi des autres.

L’île de papier photographié au centre de la composition est un présage. La Réunion, rêvée puis arpentée par Karine Maussière raccorde tous les chants à sa présence. Reste la saveur d’une amorce, d’une introduction vers quelque chose de plus vaste.

L’artiste est aux commandes. Dans cette composition kaléidoscopique, elle fait chanter le blanc, ce « et » entre les images. Espace de ponctuation, « et » défait le temps linéaire, concentre et délie les durées. Grâce à cette expire, le cabinet de curiosité oublie ses attributs de trésor accumulé. Il en va alors de notre attention lors de la marche comme devant l’œuvre : parfois intérieure, ou enchevêtrée dans les arbres, déployée sur des kilomètres, parfois concentrée auprès de quelques centimètres du sol. « Et » comme une plage entre deux falaises, comme un fruit, d’aventure choisi par le spectateur qui lui octroi couleur et goût, chaleur aussi. Feu mouvant et roche statique, le magma à lui seul dicte symboliquement cet entre-deux fructueux, et la fougère croit sur lui.

Karine Maussière marche. En elle une verticale terre-ciel prend racine et cime. L’anthropologue Tim Ingold a inventé l’idée d’un terre-ciel  et nous propose de faire vivre cette nouvelle configuration. Cette verticale devient un appel à se laisser fondre d’Orion jusqu’aux fourmis, du ciel jusqu’au revers de ses pieds. C’est un élan artistique de glanage, de décentrement de l’œil au profit d’une reddition de l’artiste à ce qui l’entoure, la lie au lieu. L’île de la Réunion, Karine est partie y vivre, partie s’y diluer, en ses chemins, sa roche, sa voûte céleste, partie se trouver sous le végétal, l’élever en des murs nouveaux. Ainsi Le royaume vert ou l’océan des possibles recèle de nombreuses découpes et peu d’horizon, pour que le spectateur se laisse traverser par l’île en pointe, puis en dévers vers la mer.

Les comparses-invisibles qui habitent l’œuvre de Karine Maussière sont jardiniers, botanistes, éthologues, sorcières aussi. Carolyne Merchant, Anna Atkins, Annabel Abbs… Karine Maussière se nourrit de leurs recherches tout autant que de ses propres pas. Entrer en correspondance, en conversation, à mesure égale avec les plantes et les animaux, voici l’entame d’un possible à venir, un début.

édition pour l’exposition Karine Maussière – Galeria Gallerati – Rome

11/04/2018

Karine Maussière Eaux et montagnes, fleurs a cura di Laetitia Bischoff


Pour un bord de mer de Karine Maussière

13/01/2016

Bords de mer - Karine MaussièreTerre grillée
En globules rouges

Monts perméables
Et ciel de lait

Les dents arides
Et consumées
D’un vieux monde

Pour « mer blanche  » de Karine Maussière

07/04/2015

Une branche sous la neige

et une veine d’écume

se ressemblent parfois

un motif ondulatoire

un tremblement sur fond de mer

ou d’hiver en montagne

 

un sursaut de ligne

en plein monochrome

merblanche - Karine Maussière

mer blanche – Karine Maussière

Pour Karine Maussière

19/01/2015

Karine Maussière

Karine Maussière

Une pause

Dans le décor

Chausse

Les temps

En un même

Bandeau

 

Une nouvelle

Ordonnée

Dans le graph

Un ciseau

Blanc

Une ponctuation

Attendue

Clôt l’espace

Pour donner

De l’espace

Au temps

 

Un souffle

Aveugle

Se contraint

En une armoire

Blanche

 

Le cadre

Conduit

Vers un

Moment

De pensée

Chronique « se rendre »

20/04/2022

typologie d’une île – Karine Maussière

Karine Maussière « arpent[e] un lieu et ce qu’il dit de nous et le cartographi[e] autrement, écri[t] depuis cet espace autant géographique qu’intérieur et accept[e] une forme de reddition à l’ordre du monde, contre nos artificielles fabriques fictionnelles. » Voici que je paraphrase le très bel article Régler ses contesde Christine Marcandier pour parler d’une artiste plasticienne. C’est parce qu’une idée traverse le texte de C. Marcandier, une idée qu’elle évoque pour la littérature et que je souhaite lui emprunter pour un petit bout de chemin du côté des arts visuels, du côté de la photographie de Karine Maussière. Cette idée, c’est celle de se rendre, c’est idée c’est celle de « la reddition à l’ordre du monde ».

L’artiste Karine Maussière, se rend à l’île de la Réunion dans tous les sens de ce verbe. Elle est partie y vivre, partie s’y diluer, se fondre en ses chemins, son ciel, sa roche, partie se clore sous le végétal, l’élever en des murs nouveaux. Karine est partie couper les cartes, faire de chaque coin de ciel une expire, c’est-à-dire qu’elle cadre au polaroid et puis étire les lignes avec de l’or et du crayon.

Elle me conte le cordon ombilical de cette île qui la relie au reste de la terre. Elle me conte aussi la constellation d’Orion au-dessus d’elle chaque nuit. Voilà ce qui donc la traverse. Une verticale terre-ciel est à l’œuvre, une verticale sans pointillés, mais quelle ligne de force sur laquelle l’artiste se joint ! Cette ligne terre-ciel est une posture artistique, une ligne nouvelle, du cordon à voûte pour narguer l’horizon, pour défaire des siècles de paysages calibrés à et pour la vue de l’homme. L’œil, même en photographie, n’est plus maître à bord ; les pieds, les tripes, le sommet du crâne dans leur ensemble et leur reliance sensible aux textures tentent de ne plus faire murmure mais d’élever un peu le ton.
L’artiste éteint presque sa présence au profit de ce qui la traverse, elle se met au service d’où elle est, son travail est où elle est.
Géographe-libre, éthologue-libre, les artistes rapprochent leur démarche des disciplines de la géographie et de l’éthologie. L’œuvre devient alors une recherche historique, éthologique, biologique, mais elle est également œuvre de porte-parole pour un territoire. Ainsi en va-t-il de Karine Maussière à l’île de la Réunion.

Article paru dans Corridor Elephant

Maupetit côté galerie

27/03/2022

Texte pour l’oeuvre de Karine Maussière exposée à Maupetit côté galerie, Marseille. Exposition Amorce #3, commissariat Flore Gaulmier

Confins : quand l’île prend la relève

29/11/2021

Voici une exposition collective, une chance émue donnée au croisement des parcours.  10 artistes se tiennent du sol au ciel en passant par les corps, les plantes et l’histoire qui les façonnent, tous. Il et elles vivent et travaillent à la Réunion. Faire lieu, c’est tisser, récolter, ajourer, expirer, coder, décoder, simplement voir le soleil se coucher.  Ils ne font pas école, ils mixent leurs énergies respectives. Ainsi on retrouve dans Confins, ce que Félix Duclassan nomme tropicalité : « la tropicalité serait nécessairement interculturelle, comme une diversité en perpétuelle reconversion, un écosystème des cultures. »

En débutant par le ciel, Karine Maussière s’attèle aux constellations. Ses dessins sont la fabrique de portraits, de géométriques sois, noirs et lignés. Une profondeur nouvelle se crée en des configurations de ciel et de nuit conjugués.  

Puis l’estampe se réveille en des teintes contemporaines, voici les différents astres et lumières des Sunscapes de Mathilde Fossy. Masami, présentant photographies et installations, se met en haut de la terre pour toucher l’au-dessus-de-l’horizon. Sa courbe de corps s’y détoure.

Lolita Bourdon, grande coloriste, invite les bords de l’océan Indien à conter en motifs monumentaux des fables et des géographies. Reprendre les rênes du pinceau et du motif, voici une clé de cette exposition qui a le mérite de faire taire la technologie au profit d’une reconnexion à un sentiment, une technique, une visée, qui creusent le sol, des racines jusqu’à Orion, et s’étendent d’une falaise à l’autre, d’ouest en est.

 Le temps perd toute heure dans les travaux de Christiane Fath car elle aussi carotte la puissance ancestrale des motifs que nos derniers siècles ont failli balayer. C’est cela qui chante dans ses géographies mosaïques : l’archaïque chèvre, le symbolique paon retrouvent par leur saisie graphique, l’ampleur de leur évocation signifiante. Les collages de Vie 464 jonglent également avec le brut et l’ancestral. Le pauvre de l’art trouve une nouvelle richesse dans ses paysages aux motifs découpés et ré-assemblés. Alors la trame s’invite chez Annaf, un code abstrait façonné pour le créole seul. On courbe les dos chez Floé tout en élançant des bras au-delà des cadres chez Florence Garnier, voici l’expire.

Les mots traversent nos yeux, nos têtes, nos tripes face aux peintures de Félix Duclassan : une œuvre stratifiée touche le nerf d’une mémoire nôtre à activer. Gommer, laver, strier, afin que le spectateur lui-même comble l’image, se rapproche de ses sujets dont l’apparition est clignotante, vacillante, sur le départ.

Cette exposition préfigure à Paris ce qui se tiendra bientôt à Saint-Paul : Le Tropical Drawing Festival, nouveau sillon insulaire pour les arts. En prévision de ce dernier, l’exposition Confins, nous met à température.



Karine Maussière, Constellations, hémisphèr Sud, 2021, dessin au crayon de couleur sur canson noir, 48x64cm, 2020

L’inventaire

27/11/2020

On dit que la rivière que l’on traverse n’est jamais la même, ne peut-on pas dire de même au sujet du vent ? L’air qui nous brosse sur son passage ne ressemble pas à celui d’hier, s’est rafraichi depuis qu’il est venu l’année dernière. Comment épuiser ce possible continu, si présent, si exhaustif lorsqu’il se joue de notre relief ? Un inventaire s’impose, un catalogue raisonné, sans chiffres, loin des données, avec du sensible pour faire vivre et revivre son parcours tracé. Cette proposition de Camille Fallet, Alexandre Field et Geoffroy Mathieu, porté par le Bureau des guides du GR2013 et l’Observatoire Photographique des Paysages depuis le GR2013, se déploie le jour, la nuit, en ligne au fil de chaque pérégrination sur www.inventaire.net.

Suzanne Hetzel – Vue de l’intérieur – 2003

www.inventaire.net , est le catalogue photographique du territoire d’un vent évalué, soumis, illuminé, depuis quarante années. À différentes latitudes du littoral, les photographes sont partis en conversation avec lui, sont revenus avec des séries concoctées au fil d’un espace. Voici un inventaire à visionner sur votre écran, comme une exposition pour les jours d’aujourd’hui, les jours où le reclus appelle le dehors, les jours où l’on a besoin de la mémoire des pas, avec ou sans sentiers pour les tenir. L’horizon et les gens, le proche et l’architecture vive, les chantiers : voyez ce paysage clair de Thibault Cuisset, cette série  Le temps présent de Pascal Grimaud, cette collection d’images autour de la thématique de la lisière porté par Bertrand Folléa, ces temps presque révolus des années 1970-1990 relevés par Fabrice Ney.  Tant de traces d’un travail sur les concordances de l’image se déploient au fil des différentes « collections » à arpenter dans l’inventaire.

Au rebord des collections, les artistes ont leurs propres séries. Suivons Iris Winckler, Suzanne Hetzel et ses diptyques dehors/dedans sous le titre  Vue de l’intérieur . À nous de coudre un lien entre chaque image de Littoralités  proposées par Karine Maussière. Je n’ai pas trouvé de lignes de fuite, je n’ai trouvé que des lignes à suivre, celles que nous forment les tuyaux, les murs, les branches et les corps. L’inventaire est souvent celui d’un tiraillement entre les énergies qui se juxtaposent sans se confondre. Il y a parfois des ‘ « noces » pour reprendre le titre d’Hélène David, des îlots de broussailles et d’esprit sauvage, des muses qui jaillissent en chaque recoin de série, de collection. L’inventaire, ne s’épuise pas en une journée, il faudra que j’y revienne pour chaque jour prendre une image ou deux, l’extraire de cette mémoire partagée et la faire mienne en traversant la journée. Je chausserai mes souliers crottés, ma tête en marche pour suivre à ma guise, par bonds photographiques, le GR2013.

Karine Maussière -Littoralités
copyright Cuisset

Vidéoème : Sans vagues

04/11/2019

avec et pour l’oeuvre de Karine Maussière

Castel Nuovo Fotografia VI edizione

30/08/2018

Eaux et montagnes, fleurs

Karine Maussière

C’è qualcosa di contemplativo che è in sintonia col paesaggio, che ci si misura, che parla quindi delle sue dimensioni, della sua potenza, del suo pensiero? Il paesaggio cosidetto naturale non è una semplice rappresentazione bidimensionale della natura, un paesaggio lo si contempla anche nell’attraversarlo. Perché abbiamo bisogno di coniare la parola Paesaggio? Che significa questo termine? In pittura, in Occidente, il paesaggio nasce con la prospettiva. Un’impressione e un punto di vista soggettivi fanno da pretesto iniziale. La percezione dei fenomeni entra in uno spazio matematico, la base, il foglio, la tela quadrilatera. Con l’avvento del paesaggio in Occidente, l’osservatore si tiene al di fuori, non è più Natura, è altro da questa, è colui che guarda. Philippe Descola – antropologo, autore di Al di là di natura e cultura – dirà che quello fu un momento decisivo di separazione tra natura e cultura nella nostra civiltà. Oggi questa scissione, che ha reso l’uomo occidentale una specie distinta da tutti gli alttri esseri viventi, è messa in discussione.
Philippe Descola ne rivela tutta la relatività dandoci molti esempi di popoli che vivono in comunione culturale con gli elementi non umani, ovvero con gli animali, le piante, le montagne, l’acqua, le rocce, il cielo. Dovendo rivedere il nostro legame col non-umano, si può rileggere il paesaggio in chiave artistica per cambiare i codici della rappresentazione e gli sviluppi del nostro pensiero, per relativizzarli e, perché no, offrirne di nuovi.
Karine Maussière è andata in giro per il mondo, e ha tracciato la propria linea d’orizzonte. L’artista Karine Maussière, girovaga fuori dal tempo, è una
fotografa. Scatta immagini istantanee con una piccola fotocamera Instax, con tutto quanto ciò comporta in termini di unicità, imprevedibilità, casualità. Abitando sulla costa Mediterranea, l’artista riprende il mare a perdita d’occhio, e le Alpi prive di qualsiasi presenza. Crea dei polittici utilizzando sequenze su pellicola istantanea, ciascuna incastonata nelle classiche orlature bianche. Studia la loro collocazione una a fianco all’altra, in modo che la linea
d’orizzonte determini la traccia generale dell’assemblaggio. Per questo le fotografie, dando la precedenza all’orizzonte, si presentano tra loro sfalsate, o a formare una curva. Karine si rifà alla concezione cinese del paesaggio. In ogni paesaggio Shanshui l’acqua e la montagna sono sacre. In ogni paesaggio Shanshui anche la calligrafia ha la sua importanza. Il gesto fotografico di Karine Maussière è un gesto calligrafico. Mi spiego: i bordi bianchi determinano degli sbalzi nel paesaggio, come distanze di tempo e di spazio impossibili da misurare tra una Polaroid e l’altra. Due uguali bordi bianchi possono significare un lasso di pochi secondi oppure di intere giornate, così come rappresentare un solo passo o una camminata di quaranta chilometri. Le posizioni sfalsate sono come allusioni a movimenti della testa, le variazioni cromatiche come richiami alla precarietà della condizione umana.
La questione del paesaggio, che sia di ieri o di oggi, di Guilin oppure di Marsiglia, è sempre la stessa: dove collocare l’uomo? Quale posto si riserva il fotografo e con lui lo spettatore? L’artista sceglie i propri punti di forza nelle vedute che compone, e ciacuno di essi, minuscolo o enorme che sia, rivela attraverso l’opera la sua personale filosofia.

Laëtitia Bischoff

émission « Le Point sur l’art » sur RDWA

05/10/2017

2017

001 Le Point sur l’art : Marlène Dumas – RDWA – septembre

002 Le Point sur l’art : Laurent Millet – RDWA – octobre

003 Le Point sur l’art : Andres Serrano – RDWA – octobre

004 Le Point sur l’art : Berlinde de Bruyckere – RDWA – octobre

005 Le Point sur l’art : Jan Bernhartz – RDWA – octobre

006 Le Point sur l’art : Laocoon – RDWA – novembre

007 Le Point sur l’art : Sophie Patry – RDWA – novembre

008 Le Point sur l’art : Esther Berelowitsch – RDWA – novembre

009 Le Point sur l’art : Les dessins de Michel-Ange – RDWA – novembre

010 Le Point sur l’art : BAULT – RDWA – décembre

011 Le Point sur l’art : Annabel Werbrouck – RDWA – décembre

012 Le Point sur l’art : Cy Twombly – RDWA – décembre

013 Le Point sur l’art : Pour un Claude Monet des années 20 – RDWA – décembre

014 Le Point sur l’art : Valérie Legembre – RDWA – décembre

 

2018

015 Le Point sur l’art : Gaston CHaissac – RDWA – janvier

016 Le Point surl’art : Fabienne Verdier – RDWA – janvier

017 Le Point sur l’art : De Julia Huteau  à Emmanuel  Levinas – RDWA – janvier

018 Le Point sur l’art : Le Corbusier – RDWA – janvier

019 Le Point sur l’art : William Turner – RDWA – janvier

020 Le Point sur l’art : Géraldine Trubert – RDWA – février

021 Le Point sur l’art : Karine Maussière – RDWA – février

022 Le Point sur l’art : Gaël Davrinche – RDWA – février

023 Le Point sur l’art : Olivia Benveniste – RDWA – février

024 Le Point sur l’art : Georges Grosz – RDWA – mars

025 Le Point sur l’art : Petros Koublis – RDWA – mars

026 Le Point sur l’art : Paul Wallach – RDWA – mars

027 Le Point sur l’art : Jean-Michel Fauquet – RDWA – mars

028 Le Point sur l’art : Claudia Fontes – RDWA – avril

029 Le Point sur l’art : Egon Schiele – RDWA – avril

030 Le Point sur l’art : Hokusai – RDWA – avril

031 Le Point sur l’art : Madeleine en extase par le Caravage – RDWA – avril

032 Le Point sur l’art : Laure Gilquin – RDWA – mai

033 Le Point sur l’art : Lorie de Stéphane Lavoué – RDWA – mai

034 Le Point sur l’art : La bergère de Moreesle – RDWA – mai

035 Le Point sur l’art : Pierrette Bloch – RDWA – mai

036 Le Point sur l’art : Felix Gonzales Torres – RDWA – mai

037 Le Point sur l’art : Mamadou Gomis  – RDWA – juin

038 Le Point sur l’art : Adrien M et Claire B – RDWA – juin

L’atelier de Nicolas Bouvier

24/11/2016

L’atelier de Nicolas Bouvier

Comme un poème de Nicolas Bouvier saisit une seule atmosphère regroupant lieux et dates disparates. Dans le recueil le dehors, le dedans, l’auteur précise à la fin de « zone de silence » : Ceylan

Galle 1955

Genève 1982

Une seule expérience visitée à trois intervalles à trente ans d’écart et des milliers de kilomètres pour un miel de lecture.

En l’atelier de Nicolas Bouvier, il est un mélange, un bricolage des temps et des saveurs. Rien n’est pur qu’en miroir d’une couture. Sous l’étoile de Nicolas Bouvier est un atelier de couture, de métissage d’une pluralité d’ingrédients.

Mario Merz est un de ces entremêleurs où la force du tout provient de la convocation d’étrennes, d’élans, de goûts disparates. Ainsi dans les igloos cohabitent l’invocation d’une forme « première » : « Cherche la première maison

Cherche la maison hémisphérique » , le néon contemporain, l’éveil politique ( phrase en lien avec la guerre du Vietnam), le naturel ( branche, tête d’animal, cire…), le monde mathématique. Un igloo est tel une carte du monde, une manière de relier, de résumer. Chaque essence, pour son aura, est convoquée en une réunion onusienne des univers : les sciences, le nomadisme, la nature, la technologie, l’architecture, le temporel, l’intemporel. Dans ce pacte artistique, où chaque élément trouve sa place, sa fonction, sa complémentarité avec les autres, un dialogue et donc presque une paix des mondes s’installe.

merz

Lors de ses résidences artistiques, Valérie Legembre arpente en une même structure différents ambiances dissociées hiérarchiquement et fonctionnellement. A l’hôpital, elle apporte une identique qualité d’attention à la chirurgienne, à l’agent d’entretien, au logisticien. Dans les laboratoires du CEA c’est idem avec les matières travaillées et étudiées. Ainsi des patchworks naissent qui resserrent littéralement les liens des mondes. Dans la démarche de l’artiste, la couture assure un rôle révélateur, réconciliateur dans l’entreprise, un rôle de rêve aussi.

Voici un poème qui fait pendant à une Peaux-de-Photos ® réalisée par Valérie Legembre. A eux deux, ils résument cette idée :

2-coussins-4ca66

Si comme ce patchwork le montre,

un jour les ondes et les systèmes pactisent,

les cellules, les particules et les protéines

s’allient en un accord cousu,

faisant fi des strates et des masses,

alors nous aurons tout à revoir,

les aurores boréales s’inviteront

dans mon jardin,

et je me liquéfierai à leur vue.

Chez le peuple Kogi (Sierra Nevada, Colombie), les cartes sont une forme qui se rapproche beaucoup de ce que nous nommons « Art ». De ce que l’on en sait, elles sont des résumés de mondes. Telle essence d’arbre pour telle vallée, associée à telle plume pour signifier telle force convoquée. En quelques centimètres, existe une compréhension du monde, un support pédagogique et spirituel.

Dans cet atelier où l’on combine, l’homme a pu mêler la nature à ses usages par l’ornement, à ses mythes par la mise en scène d’êtres hybrides, à son commerce et à ses outils. L’homme contemporain a laissé sa dernière trace d’attachement à la nature sur des logo-icônes dans lesquels chacun projette et reconnaît un usage à défaut d’un élan animal sauvage. Au sortir de cet atelier de couture, l’arabesque mathématique épouse la tige de fleur, le monde décoratif pousse, s’organise sur ce terreau. Il n’y a plus que deux mondes à table : l’homme et la plante. Encore est-il intéressant de se demander s’il fallait à la base les dissociés.

deeremotif

 

 

 

 

Il est aussi des artistes qui n’œuvrent pas en couture mais en découpe. Nous retrouvons alors Karine Maussière. Elle desserre l’expérience du paysage. C’est à nous qu’elle demande l’effort mental de couture d’horizon. Ses bords blancs sont des échappatoires, des fentes temporelles.

merblanche - Karine Maussière

Une pause

Dans le décor

Chausse

Les temps

En un même

Bandeau

 

Une nouvelle

Ordonnée

Dans le graph

Un ciseau

Blanc

Une ponctuation

Attendue

Clôt l’espace

Pour donner

De l’espace

Au temps

 

Un souffle

Aveugle

Se contraint

En une armoire

Blanche

 

Le cadre

Conduit

Vers un

Moment

De pensée

Par ces ouvertures, c’est nous, les spectateurs, qui sommes plongés en plein atelier de Nicolas Bouvier, bricolant mentalement des liens, des mains serrées pour se débarrasser des frontières.